Mes inspirations #2/15. Bilbo le Hobbit de J.R.R Tolkien et ce qui entoure cette histoire.

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Bon… difficile pour moi de ne pas souligner que ma fascination pour les Nains date de mes 11 ans, âge canonique auquel j’ai découvert Bilbo le Hobbit. Dans cette édition de poche, les illustrations montraient des Nains ressemblant à des Nains de jardins, avec des pantalons de toutes les couleurs, des chausses médiévales pointues, des barbes blanches bien lisses et des capuchons pour la pluie. Ils avaient des noms rigolos, marchaient par doublettes ou triplettes (très pratique pour se souvenir de tout le monde) et formaient un groupe compact et uni, solidaires dans l’effort, lâches et radins comme personne, dépendant du seul Hobbit du lot, le chanceux Bilbo et d’un Mage puissant vêtu de gris, le précieux Gandalf. Concernant les Nains, ils me paraissaient globalement bien inutiles, à tel point que je me demandais pourquoi Thorin, au caractère écrasant, avait pris la peine d’embarquer avec lui d’autres Nains que Balin à la vue d’aigle, Dwalin au bras fort et les deux jeunes, Fili et Kili, de toutes les corvées. Le premier niveau de lecture me faisait penser à une sorte de conte un peu farfelu avec de beaux combats, une aventure sympathique, des monstres qui chantent, un Dragon, bref, tout ce qui peut plaire à un jeune garçon de mon âge.

Malgré ce déficit d’image, les Nains avaient une quête fascinante: rentrer chez eux et chasser un énorme Dragon rouge de leur montagne! Motivés par le trésor (et par cette Arkenstone indescriptible), ils quittent le douillet confort des Montagnes Bleues et l’histoire évoque à demi-mots Azog, la Moria, Gundabad et tout l’univers environnant. Je dois bien avouer que c’est ce deuxième niveau de lecture qui m’a le plus fasciné à l’époque. De quoi parlait Tolkien? Qui était cet Azog? Où étaient les Montagnes de Fer? Pourquoi cette mésentente avec les Elfes? Et pourquoi Gandalf suait-il sang et eau dans cette histoire?

Avoir un livre qui soulève plus de questions que de réponses était nouveau pour moi.

J’ai donc fouiné à la bibliothèque chez le libraire (nous sommes en 1991, à l’époque, il n’y a pas internet) pour voir si Tolkien n’avait pas écrit d’autres livres sur le sujet car je flairais le truc monumental, l’histoire du siècle, le récit épique qui me faisait frissonner à l’avance. Je l’imaginais même, l’écrivait sur un coin de cahier, avec mes mots de pré-ado, espérant être dans le vrai, m’attendant à lire ce dont j’avais rêvé…

Amère fut ma déception en découvrant qu’il n’existait guère de bouquins de Tolkien sinon un, chaudement recommandé par le libraire, le Seigneur des Anneaux, 3 tomes, 1600 pages, un peu rude pour moi qui avait encore du mal à finir le Grand Meaulnes et l’Histoire sans fin. Je demandais conseil, plein d’espoirs « Est-ce qu’il y a un lien avec Bilbo le Hobbit? ». « Aucun » me répondirent froidement un copain de 3ème et le libraire de la FNAC.

Je suis resté sur cet échec jusqu’à l’âge de 14-15 ans, passant ma déception sur Stephen King bien qu’il restât, dans un coin de ma tête, l’écho médiéval-fantastique de mes premières passions littéraires!

Là, une discussion fortuite avec un ami me fit comprendre que le Seigneur des Anneaux n’était, ni plus ni moins que la SUITE de Bilbo! Un demi-siècle plus tard, sur un monde plus vaste, avec des guerres à plus grande échelle… Shut Up and Take my Money, voilà à peu près mon état d’esprit à ce moment précis! Ainsi, j’ai commencé à déceler, dans chaque page, les traces du Hobbit. L’anniversaire de Bilbo et sa fuite avec l’anneau (tiens tiens), qui passe le témoin à Frodon, Gandalf et l’explication plus politique de ses actes, les Trolls pétrifiés, FondCombe, que je redécouvre, la Moria (enfin!) et la tombe de Balin (hein? quoi? comment? pourquoi?), le Balrog, les Orcs, Gimli fils de Gloïn qui défend cette mine avec toute sa hargne…

Et puis les références s’estompent au fil des pages au profit de la quête de Frodon. La fascinante chevauchée des Rohirrims, le courage du Gondor et de ses alliés, Gollum, j’en ai presque oublié mes souvenirs de Bilbo!

Puis, à la fin du livre, comme pour les accompagner jusqu’au bout du troisième âge, une chronologie, immense, détaillée… et là, tout revient, la guerre entre les Nains et les Orcs de Gundabad, Thraïn, Thror, la Moria, le Balrog, la chute d’Erebor, Dain, Roi sous la montagne, Bard III et Dain II qui repoussent les Orcs du Mordor, tout y passe, je décortique tout.

Et dans cette grosse édition rouge en un seul volume, une cinquantaine de pages uniquement consacrées aux derniers descendants de Durin! Epique! On suit la bataille contre Azog, la folie de Thror, l’exil en Ered Luin, les craintes de Gandalf face à la double menace que constituerait un grand Dragon et un seigneur Balrog au milieu de l’échiquier et soudainement, la géopolitique des Terres du Milieu, complètement survolée dans le Hobbit prend toute sa substance, sa richesse. Et Peter Jackson ne passsera pas à côté, d’ailleurs…

Ce livre est donc ma fondation, ma source, mon émotion première.

J’ai imaginé la bataille de la Moria et sa conquête par les Orcs dès l’âge de 11 ans. Je l’ai vue vaciller, j’ai vu les Nains creuser trop profond, être fascinés par les richesses, j’ai vu les flammes venues des ténèbres avant même de savoir qu’un Balrog y sommeillait. Je les ai vus résister aussi… et gagner!

Ce sont ces rêves, cet imaginaire qui on construit le tome 1 du livre.

J’ai aussi imaginé que les Nains de Thorin n’étaient pas que des couards mais qu’ils avaient du courage, de la force, du potentiel pour devenir des tueurs de Dragons. J’ai imaginé des héros pénétrant dans Erebor et combatant Smaug les armes à la main. Je les ai imaginés l’emporter. Et gagner cette légitimité, rallier à eux tous ceux qui se sentaient égarés par la chute de ce lieu mythique.

Mon tome 2 n’est finalement qu’une version alternative du Hobbit. Et si le groupe de Nains partant à l’assaut de la Montagne avait été capable de l’abattre lui-même? Quelle force! Quel prestige! Quelle justice, enfin! Et quel symbole aussi pour ce peuple à la natalité si faible, aux ennemis si nombreux, voué à disparaître dans l’oubli…

Il y a une fatalité et une forme de misère dans le Hobbit. A moi de restaurer l’honneur des Nains…

Bilbo le Hobbit: 8/10. Un conte assez léger finalement, pas forcément bien écrit mais qui se trouve déposé au-dessus d’une histoire fabuleusement riche, incroyablement puissante et tellement dramatique!

Contes et légendes du troisième Age: 9/10. Tolkien a imaginé un monde. J’ignore s’il existe ailleurs une œuvre d’une telle profondeur.

 

 

 

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